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Ça devait arriver !..............
Il y avait au grenier, au coin de la vieille commode qui contenait déjà un bon nombre de trésors, un fagot de cannes de toutes sortes, bien entendu à cette époque, en bambou: cannes à gardon en trois ou quatre brins sans anneaux, cannes à vif plus grosses, plus courtes et munies d'anneaux, énormes cannes à mer dont je me demandais comment on pouvait pêcher avec, n'ayant jamais entendu parler de surf, mon père ne pêchant plus qu'en rivière ou étang, et, au milieu de tout ce bois, trois jolis brins à coupe hexagonale, vernis, avec de nombreuses ligatures, apparemment neufs bien que fort poussiéreux... Les tiroirs de la commode recélaient eux aussi un matériel assez disparate, moulinets à tambour tournant ou pivotant, plus ou moins garnis de fil, crinelles d'acier, ficelle pour lignes de fond, hameçons... Bref, de quoi occuper et tenter le gamin que j'étais...(j'ai raconté ici, il y a longtemps, mon premier contact avec une cuiller à brochet)...
Comme tous les gamins j'ai commencé avec les vairons puis les gardons, pêche statique qui permettait à mon père de me surveiller. Ce n'est que plus tard que j'ai eu le droit de le suivre à la truite, d'abord avec ma canne à vairons puis après un 25 décembre où le père Noël avait été particulièrement généreux, équipé d'une canne à lancer en bambou refendu, d'un moulinet Luxor à anse de panier et de trois cuillers Mepps N°1. Inutile de préciser que je rentrais régulièrement avec les chaussettes trempées car il n'était pas question d'abandonner le leurre dans une branche ou sous un caillou.
Le plaisir de pêcher au lancer m'a tenu longtemps mais un jour, en balade du côté des Alpes Mancelles, j'ai vu, du haut d'un pont sur la Sarthe, un pêcheur au style bizarre... Je me suis rappelé ce que mon père m'avait raconté à propos de cette jolie canne en refendu, avec des ligatures tous les 10cm, cadeau dont il ne servait jamais, préférant le lancer léger.
J'avais sous les yeux un pêcheur à la mouche ! Ma première leçon, avec le moniteur à 30m et sans dialogue... Mais la rencontre avait suffi...
De loin, j'avais remarqué que la ligne semblait bien grosse... Justement, il y avait sur un gros moulinet de la commode, une ligne jaune et noire, poisseuse... ça devait "le faire". Le marchand d'articles de pêche du bourg me vendit deux mouches (je crois me rappeler que c'étaient des imitations de mouches de mai) et m'expliqua qu'il me fallait une queue de rat... Trop chère pour ce qui restait au fond de ma poche, on ferait avec un bout de 20/100.
Et hop, la belle canne ficelée sur le cadre du vélo, direction une boucle de l'Orne dont la rive n'était pas trop boisée...
J'ai d'abord fait une belle moisson de marguerites et de dactyle. Heureusement que le 20/100 tenait sinon mes deux mouches y seraient passées et je n'aurais pas pris mon premier poisson ce jour-là : un vairon qui suite au ferrage, est passé au-dessus de ma tête... Première prise ! Premières atteintes du virus...
C'était en 1955 à peu près, on ne rencontrait pas de moucheurs sur nos rivières * , les guides de pêche n'existaient pas. Pas non plus de vidéos et de "leçons" sur internet. On était autodidacte ou rien ! ( Mais après tout, on restait entre passionnés !
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* Si, ça me revient: la rencontre, sur la Toucques, d'un pêcheur qui fouettait avec une canne à ver et qui, ma foi, atteignait une distance suffisante (à l'époque) pour proposer, depuis la rive, son imitation aux truites complaisantes bien installées sur une éclosion.