Le Noël traditionnel en Provence a donc l'avantage de ne pas nécessiter une semaine de digestion plaintive à l'aide de tisanes et autres pousse-café. Toutefois, grâce à la bienveillance de générations de cuisinières soucieuses de gâter leurs tribus, il est loin de constituer une mortification. La preuve avec ces recettes gourmandes qui ne manqueront pas de susciter des protestations indignées de la part de tous les Provençaux dignes de ce nom : comme la bouillabaisse, la ratatouille ou la daube, les gourmandises de Noël constituent autant de grands combats dont on débat passionnément autour d'un aïoli, d'une pompe à l'huile trempée dans du vin cuit ou d'un morceau de nougat.Les Treize desserts :
La liste des " treize desserts" constitue, chez les Provençaux, une source intarissable de bagarres et de polémiques. En réalité, si les desserts doivent être obligatoirement au nombre de treize, comme les convives de la Cène, leur composition diffère d'une ville à l'autre voire d'une famille à l'autre, rendant impossible l'établissement d'une liste canonique.
Six des treize desserts sont faciles à identifier :
- les quatre "mendiants" représentant les ordres religieux ayant fait voeu de pauvreté (amandes, raisins secs, noix, figues sèches) ;
- la pompe à l'huile (ou gibassier) ;
- les deux nougats (le noir et le blanc).
On y ajoute, en fonction de ses goûts et de ses traditions :
- des fruits frais (pommes, poires, prunes, melons verts, sorbes, clémentines, mandarines, oranges, raisin blanc...) ;
- des fruits secs autres que les "mendiants" (noisettes, dattes) ;
- des confiseries (calissons d'Aix, biscotins, oreillettes, pâte de coing...) ;
- des fruits confits.
N'hésitez pas à déterminer votre propre composition (le chiffre de treize est un minimum) en insistant sur les fruits, frais et secs, afin de rester dans la tradition du repas maigre qu'est le "gros souper".
Sachez enfin que tous les desserts doivent être servis sur la table en même temps et que les convives sont tenus de goûter chacun d'entre eux, même en petite quantité, afin de s'assurer chance et succès pour l'année à venir.
quelques recettes traditionnelles :
- Lou boui-abaisso de merlusso
La bouillabaisse de morue
1 bon kg de morue salée
4 cuillers à soupe d’huile d’olive
2 cuillers à soupe de coulis
2 litres d’eau
Thym, fenouil, laurier, écorce d’orange
3 gousses d’ail
Safran
Poivre, sel à vérifier
1 kg (ou plus) de pommes de terre
2 tranches de pain rassis par personne
Si l’on veut gruyère râpé et persil haché
La morue ayant été dessalée, débarrassez-la du gros des arêtes - Coupez la en morceaux carrés par trop gros - Vous pouvez laisser la peau qui évitera que les morceaux s’émiettent - Epluchez les pommes de terre et coupez-les en tranches pas trop épaisses - Hachez les oignons - Mettez l’huile dans un poêlon - Faites chauffer sans fumer, faites-y revenir l’oignon, sans roussir - Ajoutez ensuite le coulis, laissez revenir quelques instants, puis mouillez avec 1 bon litre d’eau bien chaude - Ajoutez le bouquet, l’ail épluché et émincé, le safran, du poivre, un peu de sel, puis les pommes de terre - Couvrez.
Laissez bouillir vivement 10 minutes - Ajoutez alors les morceaux de morue, et faites bouillir encore 10 minutes vivement - Avant d’arrêter le feu, vérifiez la cuisson des pommes de terre et l’assaisonnement.
Versez le bouillon sur des tranches de pain qui auront été disposées dans un plat creux ou une soupière, elles doivent être bien imprégnées, mais pas trop - On peut servir en même temps du gruyère râpé - Servez ensuite la morue et les pommes de terre saupoudrées ou non de persil haché.
- La cardo en sausso blancho e en sausso is anchoio
La carde en sauce blanche et à la sauce aux anchois
2 kg de carde
3 cuillers de vinaigre de vin
1 jus de citron
1 cuiller à soupe de farine
4 litres d’eau
Pour la sauce blanche :
50 g. de farine
50 g. de margarine
1/2 litre de bouillon
50 g. de râpé
Sel, poivre, muscade
Pour la sauce aux anchois :
3 cuillers à soupe d’huile d’olive
1 gros oignon
3 anchois
1 cuiller à soupe de farine
Eau ou bouillon
1 gousse d’ail
3 branches de persil
2 jaunes
1 cuiller à soupe de vinaigre
Cuisson des cardes :
Nettoyez les cardes en enlevant toutes les parties dures - Détachez les branches et lavez-les, puis coupez-les en tronçons de 15 cm, en enlevant bien tous les filaments - Recoupez chaque tronçon en forme de bâtonnets - Jetez au fur et à mesure les morceaux dans une bassine d’eau froide vinaigrée pour éviter qu’ils noircissent.
Faites-les cuire dans un « blanc » : délayez la cuiller de farine avec l’eau froide (il faut qu’il y ait une assez grande quantité d’eau, sinon les cardes risquent d’être amères) - Ajoutez sel, poivre et jus de citron puis portez à ébullition et mettez les morceaux de carde égouttés - Laissez cuire tout petit feu, couvert, en surveillant car cela verse facilement, jusqu’à ce que les morceaux cèdent sous la pression du doigt (1 heure environ).
Vous pourriez aussi les cuire à la marmite à vapeur bien pleine d’eau 1/2 heure. Une fois les cardes cuites, égouttez-les, rafraîchissez-les à l’eau froide, égouttez-les de nouveau soigneusement. Puis préparez-les avec la sauce choisie.
La sauce blanche :
Faites fondre la margarine à feu doux dans une casserole, après en avoir réservé une noix pour beurrer le plat à gratin - Ajoutez la farine, donnez un tour puis mouillez petit à petit avec le bouillon tiède - Mettez sel, poivre et muscade et laissez mijoter découvert 10 minutes cette sauce qui doit être bien liée.
Beurrez le plat à gratin, mettez au fond quelques cuillers de sauce, disposez dessus les cardes, recouvrez du reste de la sauce et parsemez de gruyère - Faites gratiner à four assez chaud 10 à 15 minutes.
La sauce aux anchois :
Faites chauffer l’huile dans une casserole et faites revenir l’oignon haché - Ajoutez les filets d’anchois dessalés et écrasés à la fourchette puis une cuiller de farine et mélangez le tout - Mouillez avec eau ou bouillon et déposez les cardes dans cette sauce - Parsemez avec l’ail et le persil haché - La sauce doit juste recouvrir les cardes - Laissez mijoter à petit feu 1/2 heure Au moment de servir, vérifiez l’assaisonnement. Vous pouvez, si vous voulez, faire une liaison avec les jaunes et le vinaigre.
- La poumpo à l’òli de Gisèlo de Mazargo La pompe à huile de Gisèle de Mazargues
Proportions pour 2 pompes de 30 cm de diamètre :
1 kg de farine + de la farine pour la planche
200 à 250 g. de sucre en poudre
200 g. d’huile d’olive (pas tout à fait 1/4 de litre dans le verre mesureur + 2 cuillers pour les plaques
1 cuiller à soupe d’eau de fleurs d’oranger
Facultatif : 1 cuiller à soupe d’anis en grain
80 g. de levure de boulanger fraîche
Café sucré ou jaune d’oeuf pour dorer
Eau tiède
Préparation : 30 minutes - Laissez lever : 5 à 7 heures - Cuisson : 20 à 30 minutes.
Faites fondre la levure dans 1/2 verre d’eau tiède, dans un petit bol - Ajoutez-la à 5 grosses cuillers à soupe de farine (que vous aurez prélevées sur le kilo et mises dans un grand bol), de façon à obtenir une boule molle - Tracez une croix dessus en enfonçant profondément la pointe d’un couteau - Posez cette boule au fond d’un saladier rempli d’eau tiède et laissez-la jusqu’à ce qu’elle remonte à la surface, quelquefois en 15 minutes, quelquefois, elle remonte tout de suite. Vous la laissez alors gonfler dans l’eau 7 à 8 minutes.
Mettez dans un grand saladier : le reste de la farine, le sucre, l’huile, l’eau de fleurs d’oranger (l’anis) et la boule de levain, qui est très molle - Pétrissez bien le tout, du bout des doigts, en aérant beaucoup la pâte et en rajoutant, par toutes petites quantités, un peu d’eau tiède - La pâte obtenue doit être bien liée, mais pas dure, plus souple que, par exemple, une pâte brisée.
Séparez la pâte en 2 boules - Posez-en une sur la planche à pâtisserie farinée et commencez à l’étendre en rond au rouleau - Transportez ce rond sur la plaque du four préalablement huilée au pinceau et finissez de lui donner une forme bien ronde, avec les mains, d’épaisseur bien égale, de 30 à 35 cm de diamètre.
Faites avec un couteau 4 entailles en forme de croix et élargissez-les avec les doigts, en trous ovales - Evidemment, si vous avez un emporte-pièce ovale, c’est plus simple.
Procédez de même avec la deuxième boule et portez ensuite les plaques dans un endroit tiède (mais pas dans le four) et laissez-les lever 5 à 7 heures (si l’on est très pressé, 4 heures pourraient suffire) - Attention ! le moindre courant d’air empêchera la pompe de lever ou la fera tomber si elle a commencé à lever.
Ce temps écoulé, dorez au café sucré ou au jaune d’œuf délayé avec une petite cuiller à café d’eau, mais, dans certaines recettes, on ne la dore pas, et elle reste assez terne.
Faites préchauffer le four à 150° (th. 3/4) - Enfournez la pompe - Au bout de 10 minutes de cuisson, mettez à 200° (th. 6) et laissez 20 minutes - Surveillez, mais n’ouvrez pas trop souvent la porte - Il faut placer la plaque dans la rainure d’en bas du four - Vous pouvez déposer au fond du four 4 petits récipients pleins d’eau pour humidifier.
Au sortir du four, décollez la pompe avec la grande spatule à pâtisserie en métal et laissez la bien refroidir à part sur la plaque.
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